A propos des vœux du Président français

J'ai écouté "en replay" les vœux du Président. Quasiment tout ce qu'il a dit était prévisible. Aucune surprise. Je vais donc mettre l'accent sur deux ou trois choses.

La cohésion de la nation passerait par l'école. J'ai pourtant le sentiment, peut être très personnel, que l'éducation nationale, dans sa culture élitiste , dans son train-train parfois absurde, dans son hypocrisie profonde au niveau de certains de ses principaux responsables, tendance lourde, est un facteur aggravant des incohérences, des divisions, des fractures et des échecs de notre nation. Allez donc promener le concept de simplification administrative dans les inscriptions dans les collèges où il faut scribouiller chaque année et plusieurs fois dans diverses mauvaises photocopies, les mêmes informations sur les coordonnées familiales, les personnes à prévenir, les autorisations des parents, etc. On dirait que ce sont les polices d'assurance qui dictent concrètement de façon primaire le comportement pusillanime des chefs d'établissement !... Ne parlons pas non plus de la gestion bout de papiers des absences et des retards. (refus de prendre en compte les mails alors que c'est dans le règlement, standard téléphonique dépassé par le nombre d'appels, etc). Autre bel exemple culturel : le nom d'un grand massacreur dans notre histoire, acteur du populicide des vendéens et de massacres de masse en Egypte, peut par exemple, rester le nom d'un (et même plusieurs) établissement scolaire, sans qu'il soit possible d'en parler sans risquer de discrimination pour son enfant. Enfin abordons la discrimination des élèves décrocheurs par des professeurs parfois particulièrement mesquins et destructeurs qui sapent le travail d'enseignants pertinents et bienveillants... quand ils ne les  plongent pas dans la déprime... Et savez vous qu'un médiateur académique peut être un retraité bénévole de 77 ans, bien sûr ancien enseignant ("mais je suis aussi un papa et un grand-père"...). Son âge n'implique pas de dire qu'il ne peut pas être pertinent, mais quand il envoie aux parents qui l'interpellent un diaporama de belles photos de nature pour toute réponse  concrète, sans avoir fait l'effort de les recevoir, on peut se demander si son âge ne l'a pas rendu décrocheur de la réalité. L'idée générale, c'est que la critique retombe sur l'enfant et donc les parents doivent se taire pour le bien de leur enfant. Le dialogue scolaire est plombé par ce chantage implicitement partagé.

L'Europe serait un enjeu primordial pour la France et la construction européenne devrait s'appuyer fortement sur la relation franco-allemande. Plus j'y pense, plus j'ai le sentiment que mettre en exergue en permanence la relation franco-allemande est probablement une des causes du brexit britannique. Quelque part dans les consciences anglaises on a compris, dans le souvenir également du refus du général de Gaulle de l'entrée de la Grande Bretagne dans l'Europe dans les années soixante, que décidément leur pays était la cinquième roue de la charrue de l'Europe, alors qu'il fut un acteur primordial de la victoire sur le nazisme, cette négation dramatiquement exemplaire de l'Europe. La relation franco-allemande est essentielle pour l'Allemagne et pour la France, mais elle doit se faire plus discrète dans le concert des nations européennes et dans l'esprit de nos journalistes.

Enfin sur l’accueil des migrants il y aurait tellement à dire que je préfère souligner que l'organisation de notre administration est complètement à côté de la plaque malgré les efforts de certains fonctionnaires pour tenter de résoudre les choses. Mais j'ai été témoin, à la police des frontières, d'un "officier de police judiciaire" qui insultait un migrant mineur et le calomniait allègrement en s'adressant à moi et de façon lourde. Nous étions plusieurs témoins et nous en avons fait rapport à son avocat. Notre justice et nos lois sont aussi complètement à côté de la plaque et notamment les efforts de ceux qui palient aux carences de l'Etat dans ce domaine ne devraient pas être combattus par la justice. Des pays beaucoup plus pauvres et beaucoup plus petits que nous doivent faire face, notamment en Afrique, à des quantités de réfugiés parfois 10 fois plus importantes que celles que nous n'arrivons pas à gérer. Les Français doivent arrêter de dire n'importe quoi. Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde... certes, mais comme le disait Michel Roccard, nous devons en prendre notre part.

Je suis français, c'est à dire que c'est en France que je suis né et que j'habite et que j'ai la plus grande partie de mes relations et de mon histoire familiale. Mes ancêtres étaient maréchaux-ferrant ou agriculteurs en Bourgogne, puis ingénieurs au Creusot, ébéniste au Paris-Lyon-Marseille après avoir quitté la Corse. L'un d'eux, installé à Neuilly-sur-Seine après avoir été épicier à Saint-Quentin, "chocolatier de l'empereur", a eu une médaille d'or à l'exposition universelle de 1889 à Paris. Mais ma véritable nation c'est la planète, le territoire de notre humanité de citoyens de la déclaration des Droits de l'homme, et non pas la "grandeur" illusoire de la France dans le monde. Parlons Rwanda ... et si on parle économie, si tous les pays veulent exporter plus que les autres par exemple, il y aura nécessairement un ou plusieurs perdants. Cette logique n'est donc pas bonne pour l'économie mondiale. Pourtant beaucoup de Français continuent de vivre sur ce mode nostalgique et le discours présidentiel n'aidait pas assez à sortir de cette impasse culturelle, même s'il apparaît qu'Emmanuel Macron est probablement l'un des Français, parmi la "classe" politique française, qui me semble avoir le mieux compris les enjeux actuels.

Le 2 janvier 2018 (2 ou 3 précisions ajoutées le14 janvier 2017)

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