Monsieur le Premier ministre
Monsieur Bayrou, la façon dont vous placez votre question de confiance me semble biaisée.
Il est évident que tous les partis politiques sont d'accord pour dire que la situation est grave. Les oppositions le disent depuis des années. Pourquoi vouloir leur demander leur confiance sur ce point alors que c'est la "majorité présidentielle" devenue minorité, précisément, qui refusa pendant longtemps de le voir ?
En réalité les oppositions, répondent non sans raison, qu'elles n'ont pas confiance dans les hommes du courant présidentiel, responsables des affaires depuis 8 ans, qui ont augmenté la dette de 50%, pour régler ce problème.
Quand vous dites "moi ou le chaos", vous manquez de modération. "Moi ou des difficultés plus grandes" serait plus pertinent. La première de ces difficultés, c'est votre départ qui complique les choses et qui est du à votre présence ... expression de la surdité sociale du Président de la République.
Il y a un point d'accord dans les oppositions : "faire payer les riches". Cette expression synthétique, certes radicale, englobe en fait de multiples aspects que vous esquissez timidement dans vos propositions. Le rêve macroniste du ruissellement, vieux comme la politique des deux deniers siècles, est un fantasme entretenu par des égoïsmes. C'est un mensonge qui concours en plus à justifier faussement des salaires dithyrambiques et abracadabrantesques de certains dirigeants. Quelle cécité !
Vous avez posé le problème comme on présente une négociation, dure avec les Français, voire provocante (jours fériés etc.), en pensant sans doute lâcher du lest dans une mesure juste nécessaire pour préserver le maximum pour ceux que les Français appellent "les riches", justement pour préserver dans votre esprit le ruissellement fantasmatique et cause de complexités couteuses qui détruisent la compétitivité de notre pays. Cette posture est une défiance envers les Français, une forme de chantage. Résultat, leur colère n'a fait que croitre.
Là où je vous rejoins
Là où je vous rejoins, c'est que la situation actuelle est, certes le fait des responsables depuis 50 ans (Raymond Barre disait : "La France vit au-dessus de ses moyens"), mais avec la complicité des Français :
- Par exemple, qui s'est plaint de l'allocation logement qui au lieu d'encadrer les loyers, et donc d'imposer des limites aux propriétaires de logements, a donné un coup de pouce aux locataires, mais aussi aux propriétaires qui en ont profité pour augmenter les loyers petit à petit en conséquence ? Cela a neutralisé l'effet de l'allocation.
- Autre exemple, qui s'est plaint de la prime d'activité, faite pour encourager les gens à travailler, qui permet aux employeurs de maintenir des bas salaires peu attrayants (c'est la loi de l'offre et de la demande !) ?
- Autre exemple qui s'est plaint du "quoi qu'il en coute" ? Il a évité aux Français de se dire qu'ils devaient faire des efforts pour prendre ensemble à bras le corps les conséquences de ce problème mondial d'une pandémie dont aucun homme politique n'était responsable en ce qui concerne les causes.
- Je ne m'étendrai pas sur le fait de faire glisser malhonnêtement une analyse macro-économique (le total d'heures travaillées en France) vers des injonctions ad-hominem "tu dois travailler plus" au lieu d'avoir une réponse macro-économique pour embaucher des jeunes et des séniors et augmenter ainsi le nombre d'heures travaillées en France.
- Enfin je ne m'étendrai pas non plus sur les entreprises multinationales (parfois françaises) qui spéculent sur les aides sociales de tels ou tels pays pour fixer leurs prix très élastiques, notamment dans l’industrie pharmaceutique et les matériels médicaux et plongent la sécurité sociale dans des déficits.
- Comment ne pas évoquer que les fraudes sociales et fiscales sont essentiellement dues aux entreprises. J'ai une fois travaillé en "portage salarial" pour une multinationale. Mon travail s'est effectué en France, dans une entreprise française du groupe, mais la facture de l’entreprise de portage dut être adressée dans un autre pays européen à une autre entité du groupe [1] ... Pire, l'entreprise de portage elle-même a déposé le bilan en France pendant mon intervention, mais a reçu son argent au Luxembourg dans une entreprise du même nom et du même dirigeant et mon salaire fut payé en fait sur les fonds de chômage français !!! (Nous étions une vingtaine de consultants dans la même situation dans le cabinet du liquidateur)
Je sortais d'une période professionnelle d'indépendant désastreuse où je n'avais plus aucun revenus et même des déficits ingérables, qui a entrainé une condamnation pour non paiement d'une pension alimentaire, déficit reconnu par les juges dans les motivations, mais condamnation justifiée par le fait qu'ayant rétabli ma situation, cela prouvait que j'aurais pu le faire plus tôt !!! Bref j'avais "organisé mon impécuniosité". Ce genre de jugement s'ajoute à la défiance dans la société française. - J'habite Strasbourg et je fais parfois mes courses outre-Rhin. Certaines différences de prix incroyables sont explicables uniquement par des appétits français outranciers dans nos chaines de distribution. Pourtant les dirigeants allemands roulent en Mercedes et BMW. Certes voyager en train est plus pénible en Allemagne.
- Les politiques refusent la TVA sociale, car ils connaissent peu les mécanismes comptables. Pourtant elle ferait porter une partie des recettes sociales sur les importations (notamment sur des produits peu taxés dans des pays à bas cout social) et favoriserait de ce fait les exportations par la baisse des montant HT liée au diminutions de cotisations sur les salaires. Cela ne ferait que déplacer les équilibres de façon favorable pour la France. Le déséquilibre des recettes fiscales qui porterait sur les bas revenus (à cause de la TVA réputée injuste, mais pas plus qu'aujourd'hui !) pourrait être compensé par l'impôt sur les revenus des tranches supérieures, voire par la CSG sur les tranches supérieures.
Je pourrais multiplier les exemples (aide à la voiture électrique, à la pompe à chaleur, à l'isolation....(l'isolation à 1 € fut une belle escroquerie question de qualité et une des causes de harcèlements téléphoniques)[2]. Le résultat de tout cela est que la France a fabriqué une usine à gaz couteuse de redistribution des richesses au lieu de se baser sur le travail qui paye justement et au passage au lieu d'engraisser les actionnaires français et internationaux au détriment des Français.
Depuis 50 ans tous les partis politiques ont soutenu cette politique désastreuse, soutenue par nous tous. Mais, cela ne nous autorise pas à négliger de trouver des solutions pour ceux qui objectivement ne peuvent pas travailler ou ont des charges particulières (handicapés, maladies, etc.)
Bizarrement, cette société de solidarité obligatoire, et surjouée par démagogie, a engendré une société de défiances multiples. L'intolérance domine. Refus de s'accorder avec les autres partis politiques, entre les syndicats "ouvriers" et patronaux, avec les ONG, avec les Étrangers, quelles que soient leurs situations, défiances envers la justice et les forces de l'ordre, sans parler des prix pratiqués, etc.
Quasiment tous les Étrangers, sont dans l'obligation matérielle d'entrer de façon "illégale" en France puis de se faire régulariser. Les anathèmes contre ces entrées "illégales" sont des insultes à l'humanité. Je souhaite à tous ces ayatollah de ne jamais être dans ce genre d'obligation de quitter la France. Il faut avoir un esprit particulièrement fermé pour ne pas le comprendre.
De plus je suis convaincu que ce sont les médias et les publicitaires qui sont la principale cause des émigrations économiques. On trouve des magazines occidentaux (et donc français, faut-il le préciser) dans les brousses les plus reculées, et des téléphones portables avec leurs multiples pub mensongères sur nos "sociétés de rêve" sur les hauts plateaux désertiques africains. Avant d'arriver en Europe, la plupart des immigrés ignorent notre système d'aides sociales qui est un prétexte mythique pour l'extrême intolérance. Nous sommes simplement perçus comme des sociétés riches dont on espère récupérer des miettes enrichissantes. Enfin le cout de ces immigrés est largement surestimés, beaucoup finissent par travailler très sérieusement et offrent un solde positif à ces "entrées illégales". Comment ne pas évoquer la défiance administrative à leur égard et les tracasseries administratives couteuses pour la France qu'elle engendre et souvent particulièrement mesquines, comminatoires et harcelantes pour les étrangers qui sont vites éduqués au climat de défiance française. Une partie de la criminalité française n'est sans doute pas étrangère à cette défiance.
Je n'oublie pas d'évoquer la notion de croissance du PIB. Vous achetez une voiture, vous augmentez la croissance. Vous l’utilisez, vous augmentez la croissance. Vous avez un accident, c'est objectivement une perte de richesse, mais vous augmentez aussi la croissance (réparation du véhicule, entrée en jeux des assurances et/ou achat de nouveaux véhicules, entrée en jeu éventuelle du système de santé, etc.). Le PIB est un indicateur d'activité et non de richesse. Mais agir pour réparer reste neutre. Utilisée politiquement, la croissance est une illusion.
Autre remarque, un peu décousue en apparence : j'ai demandé aux IA Mistral, Deepseek et ChatGPT combien les Français économiseraient s'ils respectaient les limites de vitesse : réponse 5 à 10 milliards d'euros par an, soit 10 % à 20% de la consommation annuelle en carburants de la circulation en France (plus on va vite, plus on consomme de façon exponentielle). De quoi augmenter le pouvoir d'achat ! Mais cela réduirait la croissance et les recettes de l’État (contraventions, taxe pétrolières, TVA, etc.) et le plaisir au volant des conducteurs et conductrices surtendus et impatients qui se libèrent en appuyant sur le champignon ! Et cela contribuerait à réduire le déficit de la sécurité sociale (moins d'accidents, et donc moins de blessés).
Voilà pourquoi, Monsieur le Premier ministre, je pense que votre question de confiance est biaisée.
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1 - J'avais mal rédigé cette phrase dans ma première publication. Elle disait le contraire de ce qui s'est passé.
2 - Je suis très favorables à la transition écologique. Cela entre beaucoup en compte dans mes décisions personnelles. Ce que je déplore, c'est que cette transition se fasse à coup de subventions au lieu de rémunérer correctement le travail.
L’État se sent obligé de compenser les mauvaises décisions des entreprises. Les entreprises se brident elles-même en maintenant des bas salaires et en se basant sur des modèles hasardeux et des "modes" (fashion) managériales. Derrière tout cela il y a une crise des décideurs économiques qui naviguent à court terme, c'est à dire des banques et des actionnaires qui ne prennent aucun risque dans la production et d'immenses risques dans des bulles financières, avec les propagandes qui en découlent. Les perspectives illusoires de gros gains détruisent les possibilité de gains plus modestes mais plus bénéfiques pour la société. Cela ressemble à un citoyen qui préfère jouer au loto pour gagner sa vie, au lieu de compter sur un salaire. Bref nous sommes plombés par les crétins de la finance aux égos surdimensionnés, perdus dans des rêves de gros coups et déconnectés du réel.
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