L'impasse française, tout ça pour ça !

J'avais bien entendu beaucoup apprécié le discours de Dominique de Villepin à l'ONU au moment de la guerre en Irak. Par contre, j'ai condamné sévèrement les propos de Dominique de Villepin sur le Rwanda, avant la sortie du rapport Duclert, et notamment ceux qui ont fait l'objet de deux livres de Patrick de Saint-Exupéry, L'inavouable la France au Rwanda (2004) et sa réédition augmentée, Complices de l'inavouable. Je ne sais pas quel est son discours aujourd'hui à ce sujet.

J’apprécie grandement sa clarification concernant la situation actuelle dans la vidéo suivante sur LCI le 11 juillet 2024 :
Dominique de Villepin invité de LCI : "les Français veulent une cohabitation"

Les "Macronistes" ne comprennent pas, comme une grande partie des journalistes tels qu'on les voit à travers leurs questions, que les étapes décrites par Dominique de Villepin doivent être vécues et non pas théorisées en une fraction de secondes. 

Chaque étape induira, pour chaque citoyen et élu, une modification de son état de conscience. On ne sait pas définitivement ce que chaque étape, en situation, donnera comme conséquences concrètes. 

Emmanuel Macron veut choisir à la place des Français, c'est ce que Dominique de Villepin appelle "Jupiter". Sur ce point, il est d'accord avec le NFP, les LR et le RN. Ce "Jupiter" a été clairement rejeté par les Français dans les urnes. 

Mais "Jupiter" n'est que l'enveloppe de la jouissance du pouvoir, jouissance qu'Emmanuel Macron doit abandonner. Il croit sincèrement qu'il est le meilleur. Brigitte doit probablement le lui rappeler souvent, quand elle ne l’engueule pas pour qu'il le soit. Il doit comprendre que le mieux est l’ennemi du bien. 

Au sujet de LFI et du RN, on peut critiquer leurs analyses, mais ils ont été choisis, globalement, par une majorité de français. Cela doit être respecté. La grille droite-gauche empêche d'avoir l'esprit libre. Il y a beaucoup d'aspects de droite à LFI (notamment la gouvernance du parti) et beaucoup d'aspects de gauche au RN (retraites, pouvoir d'achat, justice sociale, etc.). Sur le plan social, l’agglomération des préoccupations de LFI et du RN est largement majoritaire en France et a de nombreux échos dans les autres groupes politiques. Ce sont de solides préjugés cristallisés dans leurs arguments de combats qui séparent les groupes politiques. Ils doivent abandonner ces postures. Autrement dit, Marine Le Pen et Jean-Luc Melanchon sont très proches sur beaucoup d'aspects, mais ce sont leurs idéologies, c'est à dire les échafaudages de leurs pensées, qui leur font croire qu'ils n'ont rien à faire ensemble. La réalité de l'immigration les sépare, décrit comme un problème par le RN et particulièrement mal évalué quant à ses solutions (cf. Giorgia Meloni en Italie), et accompagnée par la LFI, qui probablement sous-estime l'intolérance, voire le racisme, de Français avec ces personnes qui viennent d'un monde qui leur fait peur (terrorisme, etc.).[1]

On ne peut pas dire que des élus ne savent pas faire, si on ne les laisse pas faire. On a laissé Emmanuel Macron faire. Le résultat n'est pas à la hauteur de ses propres attentes, nous sommes dans une des pires situations que la France ait connues. Ce n'est pas une situation où l'on peut se permettre de mettre en doute les choix des Français. 
 
Le "quoi qu'il en coute" était parfaitement démagogique. Mais personne, pas même moi, ne l'a combattu ouvertement. C'est la peur des gilets jaunes qui l'a imposé au Président. Mais on a réglé le problème des gilets jaunes uniquement avec des mots présidentiels. On n'a même pas eu une synthèse des cahiers de doléances, preuve de l'aspect manipulatoire de la démarche. [2]
 
Dans un crise comme celle du Covid, tout le monde doit en assumer les conséquences financières, à commencer par les plus gros récepteurs de flux d'argent. Ces flux sont restés chez les actionnaires. C'était une connerie monumentale et une grande injustice.
 
La clarification voulue est sans appel : c'est le chaos. Depuis deux décennies, on a trop cherché à gouverner contre les Français au nom du "courage politique" de braver l'opinion populaire. Mais ce type de courage, cette bravache à la Sarkozy, est contraire aux principes de la République, surtout quand il sert à protéger les intérêts de quelques nantis qui se glorifient de son auréole trompeuse. Il doit rester exceptionnel et honnête. Sinon c'est un "courage" arbitraire et stupide. Il faut avoir le courage de le reconnaitre.
 
Au lieu d'écouter la feuille de route très claire de Dominique de Villepin, Emmanuel Macron cherche à continuer de gouverner. Après avoir rejeté sa première étape, Lucie Castets pour affronter le casse-tête, il multiplie les consultations sans parvenir à un résultat. Il pédale dans le yaourt. Son côté manipulateur tente probablement de faire céder les potentiels membres du gouvernement qu'il envisage. On croit à un Bernard Cazeneuve ou à un Xavier Bertrand comme premier ministre, mais il tente peut être de les agglomérer comme chefs de files de deux tendances au sein d'un même gouvernement dont on ne connait pas encore le titulaire. Bref il nous bricole peut être une solution à sa main, si toutefois les pressentis se laissent manipuler au nom de l’intérêt des Français.

Dans une telle situation, le père de la cinquième République aurait clairement dit quelque chose comme : "Les Français ne veulent plus que je gouverne, je m'en vais, il n'y a plus rien de commun entre moi et ce qui est". 
 
Nous entrerons en sixième république dès qu'Emmanuel Macron quittera la présidence. On peut le remercier d'avoir mis en lumière tous les pièges de la cinquième République. Nous devons rechercher une meilleure harmonisation de nos institutions avec celles des autres pays européens.
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  1. Le RN accuse les immigrés d'être majoritairement représentés dans la population criminelle. Mais je fait observer que le très mauvais accueil qu'ils reçoivent en France en pousse probablement beaucoup à des comportements d'incivilités, voire à des crimes. Le vent sème la tempête des amalgames.
  2. Que sont devenus les cahiers de doléances lancés après le mouvement des "gilets jaunes" ? France Inter 10 février 2020


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