La vérité sur la mort des gendarmes Didot et Maïer et l'épouse de Didot au Rwanda en avril 1994 ?

L'association Survie  et les familles des gendarmes français assassinés à Kigali peu après l'attentat du 6 avril 1994 portent plainte contre X.

"Ce lundi 8 avril 2024, Maîtres Hector BERNARDINI et Jean SIMON ont déposé une plainte pénale contre X avec constitution de partie civile auprès du Doyen des juges d’instruction près le Tribunal Judiciaire de Paris, pour des faits de crime de guerre, homicide volontaire et usage de faux en écriture publique. Cette plainte, portée par des ayants-droits des victimes et par l’association Survie, vise à établir les responsabilités concernant la mort de deux gendarmes français et de l’épouse de l’un d’eux, à Kigali dans les premières heures du génocide des Tutsis.[...]" [1]

Cette plainte, qui semble avoir été déposée à une date anniversaire limite au plan judiciaire, est de la plus haute importance. Elle cherche à faire émerger la vérité sur un scandale concernant la mort de ces trois Français et Française, un Rwandais, et pourrait avoir des conséquences sur certains aspects de l'attentat du 6 avril 1994 contre les présidents rwandais et burundais, souvent qualifié en France de "déclencheur du génocide" et par certains initiés de "signal déclencheur du génocide".

Il est étonnant que la gendarmerie française n'ait jamais déclenché cette enquête pour des faits graves concernant l'assassinat de gendarmes français. Il faut que ce soit l’association Survie (souvent cataloguée "d'anti-france" par certains idéologues) et bien sûr les familles qui prennent ce problème à bras le corps, probablement créé par une problématique étatique mal fagotée.

On peut observer, notamment, qu'un officier de gendarmerie présentant ces gendarmes comme étant sous son commandement puisqu'il parle de "ses" hommes, n'ait jamais réussi ou pensé à porter l'affaire devant la justice.

Cependant, on ne pourra s'empêcher de faire remarquer que cet article du journal Le populaire du centre [2], de novembre 1996 donc moins de trois ans après le génocide, montre un officier français de gendarmerie particulièrement engagé aux côtés des Hutu, passant sous silence le génocide des Tutsi après sa commission (évènement négligeable pour quelqu'un qui "décrypte le conflit rwandais" ? - "conflit" pour génocide c'est plutôt négationniste) et présentant les Tutsi, alors victimes reconnues du génocide, comme des êtres peu recommandables, "avides de pouvoir" et agissant "en toute impunité" qui auraient probablement été auteurs de l'attentat du 6 avril 1994, "à qui peut bien profiter le crime sinon à des Tutsi avides de pouvoir", "Rien ne semble pouvoir refréner leurs ambitions". Par contre, implicitement les génocidaires Hutu ne seraient "pas sanguinaires" puisqu'il suffisait, pour sa mission française de toute évidence, d'ajouter "un peu de démocratie" à une République "autoritaire", en réalité mono-ethnique Hutu traquant et exterminant les Tutsi. 

Quelle inversion de la réalité de la part d'un officier de police judiciaire français ! C'est d'autant plus grave qu'il a vécu 3 ans au Rwanda, "entre le mois de septembre 1990 et septembre 1993" et aurait pu se rendre compte avec un minimum de sens critique  de la réalité des choses. Etait-ce le gouvernement Hutu rwandais ou le gouvernement pro-Hutu français qui lui versait sa solde ? 

Cet article ridiculise la gendarmerie française et une mise au point sérieuse aurait du être faite par son directeur général. Comme je crois à l'évolution des gens, peut-être le fera-t-il un jour lui-même s'il évolue vers plus de lucidité, comme l'a fait partiellement par exemple Alain Juppé ? [3]

Un officier de gendarmerie a écrit plusieurs articles indignés au sujet de ces assassinats.[4]

On peut imaginer que la famille du jardinier rwandais et l’État rwandais seraient susceptibles de se joindre à cette plainte, puisque dans le livre de Pierre Péan [5] ces gendarmes sont présentés comme assassinés par le FPR [6], sur la base de témoignages non vérifiés et interprétés de façon douteuse.

Depuis trente ans les articles se sont multipliés sur ces assassinats. [7]

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  1. La plainte de Survie et des familles des gendarmes Didot et Maïer et de l'épouse de Didot
    Survie - 9 avril 2024
  2. Le Populaire du Centre 30 novembre 1996 - Journal de Limoges.
  3. Monsieur Juppé, peut-être encore un effort ! Alain David 12/04/2021
  4. - Le triple assassinat de Gendarmes français au Rwanda en 1994 - Club de Mediapart -10/01/2022
    - Les crimes commis contre des français doivent-ils rester impunis ? - Club de Mediapart - 09/09/2019
  5. Noires fureurs, blancs menteurs - Mille et une nuits - Fayard
    Ce livre paru en novembre 2005, particulièrement raciste et injurieux, est un pamphlet mitterrandien, révisionniste et négationniste (théorie du double génocide), très binaire pro Hutu et anti-Tutsi, dont le rapport Duclert montre implicitement tous les mensonges.
  6. FPR : Front patriotique rwandais, groupe politico-militaire constitué en Ouganda par des réfugiés Tutsi chassés par des épisodes anti-tutsi pré-génocidaires entre 1959 et 1994, et quelques Hutu, et à qui la République exclusivement Hutu refusait le droit de rentrer au pays. Le FPR a attaqué militairement le Rwanda en octobre 1990 et pris le pouvoir après avoir chassé le régime génocidaire en mettant fin au génocide des "Tutsi de l'intérieur".
    Le FPR dirige actuellement le Rwanda sous la houlette de Paul Kagame, dans une république acceptant tous les Rwandais indépendamment du clivage ethnique artificiellement créé lors de la colonisation. Bien sûr il combat les anciens génocidaires qui basculent  dans le terrorisme, entretiennent des liens avec le terrorisme ou prolongent l'idéologie génocidaire. Ce clivage construit en concepts idéologiques Hutu-Tutsi assimilés à des ethnies ou des races, mais correspondant en réalité à des catégories socio-économiques, agriculteurs et éleveurs d'une société exclusivement rurale.
    Il est désormais constitutionnellement interdit de faire référence aux concepts Hutu et Tutsi dans la vie politique et civile rwandaise. Les historiens et psychologues, doivent évidemment comprendre cette mécanique conceptuelle qui a profondément marqué les esprits entre les années trente et le génocide des Tutsi. D'une certaine manière le génocide des Tutsi fut le point d'orgue de cette création coloniale des "ethnies" Hutu et Tutsi, divisant la société rwandaise de façon binaire entre les bourreaux et ceux qui ne les remettent pas en cause, et les victimes et leurs proches.
    Les Gacaca ("gatchatcha" phonétiquement pour les français), tribunaux populaire adaptés au jugement des suspects génocidaires sur la base d'une tradition populaire de médiations locales, permirent à la population de remettre en cause l'impunité traditionnelle protégeant les Hutu depuis des décennies, de s'approprier un récit collectif et partagé du génocide et de construire les bases d'un vivre ensemble.
    Il faudra du temps pour que les plaies et les cicatrices s'apaisent en profondeur dans tous les esprits. Cf. Hutu et Tutsi
  7. Recherche sur "Didot et Maïer" dans la base de données de France génocide Tutsi

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